Ce dimanche à 8 heures, les bureaux de vote de la 5^e circonscription de Saône-et-Loire seront ouverts. Dix mois seulement après les dernières élections législatives, les électeurs sont appelés à voter de nouveau pour élire leur député. En cause, l’annulation du résultat, le 7 mars dernier, par le Conseil constitutionnel après un recours déposé par le candidat macroniste d’alors, Louis Margueritte. Après avoir constaté plusieurs irrégularités de comptage au premier tour, les Sages ont finalement décidé d’invalider les résultats de cette circonscription tombée pour la première fois dans les mains du Rassemblement national avec l’élection du candidat Arnaud Sanvert.

Et, moins d’un an plus tard, rien ne dit que ce dernier est assuré de remporter de nouveau sa mise. La dynamique électorale locale n’est plus la même. De nouvelles têtes sont sur la ligne de départ tandis que celle-ci s’est élargie pour accueillir neuf candidats au lieu de six la fois précédente. Le risque d’éparpillement des voix, couplé à une faible mobilisation des électeurs, rend le scrutin ouvert pour plus d’un candidat.

À LIRE AUSSI « C’est Dallas dans les Hauts-de-Seine » : la droite et le centre se déchirent à BoulogneLa quadrangulaire de juillet dernier s’avère cette fois-ci quasi impossible. La faible participation attendue rend la barre des 12,5 % des suffrages nécessaires pour atteindre le second tour presque inatteignable pour le troisième et le quatrième candidat. Presque assuré de voir un match retour à deux candidats, chaque prétendant en lice fait donc campagne dans l’espoir de se hisser au second tour pour ensuite obtenir un report de voix suffisant contre le candidat du Rassemblement national.

Conscient de l’opportunité qu’offre ce scrutin pour rafler un nouvel élu, plusieurs figures nationales, telles que Jordan Bardella, Marc Ferracci, ministre de l’Industrie, et Manuel Bompard, coordinateur de La France insoumise, n’ont d’ailleurs pas hésité à se déplacer pour soutenir leurs poulains respectifs.

Une gauche divisée

Le premier changement de taille dans ce scrutin se trouve à gauche. Tel le reflet du climat presque délétère entre les partis au niveau national, les quatre formations ont décidé de partir en ordre dispersé. Les socialistes locaux présentent cette fois-ci une candidature face à l’Insoumise Fatima Kouriche, ancienne candidate du NFP en juillet dernier. Une décision prise à l’unanimité par le conseil fédéral socialiste de Saône-et-Loire. « Le NFP ne pouvait pas gagner, l’étiquette LFI nous fait perdre, c’est un plafond de verre », explique au Point le candidat socialiste Clément Mugnier. De leur côté, les communistes ont fait le choix de ne soutenir aucune des deux candidatures, tandis que les Écologistes soutiennent du bout des lèvres l’Insoumise. « Ils ne viennent même pas la supporter sur le terrain », souligne M. Mugnier.

Avec cette candidature, l’objectif du parti à la rose est double : préfigurer les prochaines élections en actant sincèrement la rupture avec les Insoumis, tout en essayant de les distancer lors du scrutin pour légitimer ce choix d’affirmation. « Les Insoumis ramènent la cavalerie – Manuel Bompard et Manon Aubry – pour soutenir leur candidate, alors que nous, nous sommes dans une campagne locale sans déplacement de la direction nationale », précise le sénateur de Saône-et-Loire, Jérôme Durain, fier de voir les socialistes mener une campagne « locale » et sans le parti mélenchoniste.

Toutefois, ces divisions n’empêchent pas la candidate Insoumise de revendiquer l’étiquette du NFP et d’inscrire le logo de l’alliance sur ses tracts de campagne. « Pour faire cela, il faut l’accord des quatre partis ; en l’état, ils ne l’ont pas », s’offusque Mugnier, précisant que la direction socialiste locale a déposé une mise en demeure contre l’utilisation de ce logo. En cas de résultats proches et décisifs pour le second tour, un recours pour une nouvelle annulation n’est pas à écarter, nous apprend le socialiste.

Un bloc central sous tension

Du côté du bloc central, l’état des lieux des forces en présence ne garantit pas non plus une victoire. Au milieu de l’échiquier s’affrontent deux binômes. Marie-Claude Jarrot, maire (Horizons) de Montceau-les-Mines, et Louis Margueritte (Renaissance), son suppléant et collaborateur de cabinet de François Bayrou, s’opposent à Sébastien Martin, président du Grand Chalon, et à son suppléant, Lionel Duparay.

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Idéologiquement proches, les deux camps s’adonnent depuis le début de la campagne à une querelle vis-à-vis de leurs soutiens. Le premier binôme, inversé il y a huit mois avant que M. Margueritte ne rejoigne Matignon, revendique l’appui de l’UDI, du MoDem, de Renaissance et d’Horizons, tandis que le second se présente comme le candidat du parti Les Républicains. « Il n’a même pas le soutien de la direction nationale, personne ne lui a donné l’investiture », s’exaspère sa rivale. « Au moment de l’affaire Ciotti, je n’avais pas repris ma carte, je n’ai donc demandé aucune investiture, mais, si je gagne, je siégerai avec Les Républicains », se défend le candidat Sébastien Martin, qui accuse en retour sa rivale de ne pas être claire sur son parti d’appartenance. « Je suis une candidate capable de rassembler du centre droit au centre gauche », rétorque celle-ci, refusant de s’astreindre à une étiquette partisane. « Les deux sont ambigus, car, au fond, ils sont dans le même couloir », décrypte un connaisseur de la circonscription.

Face à ces multiples tensions, Arnaud Sanvert, le candidat RN qualifié de « député fantôme » par ses adversaires, espère pouvoir remporter à nouveau sa mise. « Arnaud n’a rien à redouter de ces barons locaux pleins de suffisances », tance le porte-parole du parti, Julien Odoul, venu soutenir l’ex-élu sur le terrain. « Numéro deux de tous les députés en termes d’assiduité à l’Assemblée, il est le véritable candidat du peuple », abonde le député de l’Yonne. Autre interrogation de ce scrutin, le vote lepéniste sera-t-il aussi massif que la dernière fois, lorsqu’il atteignit les 35 % au premier tour en juin dernier. Avec l’arrivée de deux nouvelles candidatures d’extrême droite, Alexandre Hinger, pour Le Parti de la France, et Nathalie Szych, pour Les Patriotes, l’équation se complique encore un peu plus pour le parti à la flamme.